mercredi 15 septembre 2010

Ouille, mes aïeuls...



Combien de personnes font des recherches sérieuses sur leur passé? Vous le savez-vous ?  Beaucoup, sans doute.  Dont moi.  Enfin, pour moi, cela a fait long feu.  J’ai failli, dans tous les sens du terme. J’aurai essayé. C’est mieux que rien.  Cela a donc commencé comme ça.




Bruxelles, le 27 ... 2010


SA Eugène et Alogie
Rue du destin, 7
5249 L’Arbre





Cher Monsieur Bortolini,


Voici les résultats de nos recherches concernant vos aïeuls et autres grands-parents.  Autant vous l’ annoncer de ce pas et illico, nous n’avons rien trouvé, absolument rien. 

Il faut bien reconnaître ce qui doit l’être, vous ne nous avez pas vraiment facilité la tâche.  Je dirais même plus, vous nous avez franchement compliqué la vie. Car enfin quoi votre, et je vous cite, « Je souhaiterais en savoir davantage sur mes arrières-grands-parents dont je ne sais rien » était somme toute assez vague.  Bien sûr, vous nous avez donné quelques indications sur vos grands-parents, mais vous savez, et si vous ne le savez pas, nous nous faisons un devoir et un plaisir  de vous l’apprendre, en matière de généalogie plus on remonte dans l’arbre plus les branches sont hautes et difficiles à atteindre.  Et de fait, nous n’avons rien atteint du tout ; et ce n’est pas votre vague « Ma grand-mère maternelle est née à Lille, elle s’appelait Louise De Rogez et sa mère était hollandaise » qui nous a facilité la grimpette.  Et ne parlons pas de votre famille italienne qui semble surtout avoir été autrichienne ou peut-être slovène pour une partie et peut-être des Pouilles mais sans certitude pour l’autre.  Et nous ne vous parlons même pas de votre grand-père maternel qui sinon se prénommer Lambert ne semble avoir aucune substance.

Voilà, Cher Monsieur Bortolini, l’essentiel de ce que nous tenions à vous dire.  Nous vous joignons nos honoraires, comme convenu.  Elles vous paraîtront certainement élevées au vu des résultats obtenus, mais nous pouvons vous assurer que nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir et dans nos capacités pour vous aider à en connaître plus sur vos aïeux et autres grands-parents.  Mais que voulez-vous, à partir de rien on n’a jamais obtenu grand chose.  Nous l’avons expérimenté une fois de plus.

Vos dévoués,


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Me voilà bien... Que faire face à un tel désastre ?  Je m’étais fait une joie de pouvoir réunir toutes ces informations pour rendre mon histoire plus complète, plus pleine et en faire une histoire commune et collective avec mes enfants et ce qu’il me reste de famille.  J’avais imaginé une galerie de portraits bien encadrés avec en guise de légende la vie, l’histoire de la vie de mes arrières-grands-parents.  Des portraits qui auraient pu nous éclairer sur notre passé, notre présent et éventuellement notre avenir... Et voilà qu’en guise d’histoires à raconter, c’est le néant.  Ou pire, la conscience du néant.  Je n’ai rien.  Il n’y a rien.  Ma vie s’arrête au début du siècle passé avec la naissance de mes grands-parents.  Plus loin ou plus avant ou plus haut ; quelle formule choisir ?; il n’y a rien.  Et en tout cas, je ne sais rien, c’est donc tout comme.

Alors... Peut-être, sans doute, faut-il se résoudre à ne pas savoir, à se contenter d’avoir une généalogie d’arbuste.  Je ne sais pas.  En tout cas, je ne me sens nullement attristé.  Je sais plus ou moins d’où je viens.  De quel milieu, de quelle culture, de quelles joies, de quelles tristesses, de quelles peines... Ce que je ne sais pas, je l’invente, souvent.  Personne, je crois, ne pourra me dire que j’ai tort ou encore que je mens.  Je peux décider que mon arrière-grand-père maternel aimait le souffle du vent dans ses cheveux.  Ou que mon arrière-grand-mère paternelle n’a jamais aimé les navets.  Ce ne sont pas des informations essentielles... pourtant elles disent beaucoup de ces personnes.  Alors, il m’arrive d’inventer pour combler les vides, pour remplir les manques.  Ce n’est pas toujours nécessaire, mais parfois cela m’est utile.  Je m’en remets à l’un ou à l’autre de ces hypothétiques ancêtres et, selon, cela m’aide ou me laisse perplexe.  Aujourd’hui, avec cette certitude de ne pas trouver, ou de ne pas vouloir chercher plus loin que le bout du siècle passé, je sens que je peux aller de l’avant.  Je veux dire que je sens que ne pas savoir n’empêche jamais de comprendre, alors que ne pas comprendre empêche de savoir.  Je ne sais donc pas grand chose, mais cela suffit.  Cela me suffit. Pour commencer.



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