jeudi 22 décembre 2011

Prise d'otages


Hier soir, j'ai beaucoup ri en regardant l'émission sur l'Apocalypse du 21 décembre 2012.  J'ai ri en regardant et en écoutant des illuminés annoncer avec le plus grand sérieux qui est généralement le propre des doux dingues que dans un an nous allions tous y passer. Enfin, tous... pas eux... car ils se préparaient et, pour qui le voulaient et en avaient les moyens financiers, il était possible de vivre et de survivre à ce grand moment de la fin de l'histoire humaine. Il valait mieux en rire, parce que certains aspects de cette clique de gourous en tout genre sont symptomatiques de notre joli présent. Dans une des séquences, on voit des futurs élus communiquer avec le grand tout, avec la Terre ou que sais-je encore, enfin on ferme les yeux, on écoute ce que le Maître ou la Maîtresse dit et on se reconnecte avec son énergie, l'idée étant que l'on peut changer le cours des choses, pourtant irrémédiables... allez comprendre. Aaah la communication avec l'invisible... quoi de plus mieux?

"(...) j'appartiens à une génération qui n'en est pas une. Qui n'a pas eu le sens du collectif, et dont les membres se sont reconnus à ce même signe invisible et mystérieux et pourtant patent : l'impuissance à avoir un "nous". Chez certains, très peu en vérité, cela a mené à un refus assumé et à l'acceptation d'être un "moi" séparé des autres; chez d'autres, la plupart, sans doute, cela s'est accompagné d'un remords et d'un malaise, composé par un culte flou de l'humanité en général, et d'une croyance en la "communication", devenue, de fait, la religion de ceux qui n'en ont pas."  (Michka Assayas - Faute d'identité)  Aaaah la communication comme moyen de se rassurer...  

Je ne vais pas discutailler sur la manière dont la Bande des Six a décidé de passer outre les plus élémentaires voies de concertation, sur la réforme des pensions, pour sectionner une des mailles du filet qui empêche une bonne partie de la population de s'enfoncer encore un peu plus dans la malvie. Ils ont choisi cette manière là. Nous voilà entrer dans l'ère de la Tweetpolitique. Cela en dit long sur la qualité de ces gens. C'est pour rassurer les marchés...? Aaaah la communication comme moyen de se rassurer... 

Mais le pire, je crois, c'est la communication des médias; oui oui ou non non, les médias n'informent plus, ils communiquent eux aussi, ils communiquent la parole des dirigeants politiques ou économiques (leurs patrons de fait), les paroles du Maître ou de la Maîtresse, sans beaucoup de retenue. Cela nous a déjà valu quelques jolis moments. Je me souviens avec émotion de Véronique Lamquin et de son "Et oui, osons le dire, cette équipe a belle allure. Certes, elle a un air de déjà-vu... Et alors? Le temps presse : l'expérience sera une précieuse conseillère durant cette législature amputée. Du reste, celles et ceux qui rempilent ont, pour la plupart, largement démontré qu'ils avaient la carrure ministérielle". Ou de Béatrice Delvaux et son poignant "C’est ce qu’on appelle l’adaptation du modèle social, qui va de pair avec un recul social. Ces mesures nous étaient annoncées comme inévitables depuis belle lurette. La perte de notre compétitivité, le déplacement des pôles de croissance hors d’Europe, le vieillissement de nos populations, confrontés à l’état de nos finances publiques, imposaient des réformes. Elles vont nous faire mal, exiger de nous des modifications dans nos modes de vie." Il y en a d'autres. Pas que des femmes. Pas que des francophones. Ainsi, De Morgen et Steven Samyn d'exiger un service minimum... oui oui un journal socialiste et pas celui de la FEB.  La machine est désormais bien huilée... On nous met face à l'irrémédiable, face au c'est comme ça, au il n'y a pas moyen de faire autrement... et on nous promet que si on fait comme ça, tout ira mieux... alors reconnectons-nous avec les Marchés, écoutons ce qu'ils ont à nous dire. Aaah la communication avec l'invisible...

Dans Libération d'aujourd'hui, on trouve la manière dont les cadors de l'UMP parlent de la grève.  Vous savez quoi? La grève c'est une prise d'otages. Et donc, les grévistes, si je comprends bien, des preneurs d'otage. Des criminels quoi... et les criminels, vous savez bien ce qu'on en fait. Jusque là, les journalistes n'assumaient pas directement, ce sont les 'victimes' de la grève qui disaient 'On nous prend en otage'. Là, ça y est, pour Vincent Slits, "Ce qui n’est pas acceptable, par contre, et d’aucune façon, c’est l’anticipation d’un tel mouvement de grève de 24 ou 36 heures comme cela a été le cas en Wallonie et à Bruxelles, ces mardi et mercredi, à la SNCB, dont une partie du personnel a pris en otage des milliers de navetteurs." Preneurs d'otage... ça flirte avec terroriste ça, non? Non, allez j'exagère, je m'égare. Vous savez quoi, il y a un jeu vidéo - Armored Core - où on peut éliminer des grévistes, même que ça rapporte 13.000 points... 

Allez en paix, en vérité je vous le dis, la fin du monde, c'est pas pour le 21 décembre 2012... on y est. Alors, d'ici là, ouvrez les yeux et déconnectez-vous.

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