vendredi 31 décembre 2010

Dernière mauvaise nouvelle de 2010


Il y a des endroits où l'on passe et on se dit « Tiens, y’avait quoi là avant ? ». Moi, ça m'arrive souvent. Et souvent, je ne m’en souviens pas.  Cette fois, je m'en souviendrai.  'La Maison du porte-plume' a fermé... J'y ai acheté tous mes stylos.  Un stylo quand on aime ça, on en achète plusieurs, beaucoup.  C'est comme les montres pour certains.  C'est comme les chaussures pour d'autres. Moi c'est les stylos.  Sauf lors de voyages, je n'en ai achetés que là.  Voir ce volet fermé et l'avis de fermeture avisant de contacter Maître Untel pour tout renseignement m'a rendu triste.  Il y a des lieux qui colorent une existence, qui marquent une ville, qui font rêver... Bruxelles en compte un de moins. 



mercredi 29 décembre 2010

Je suis complètement battue




Il y a quelques jours, à Bruxelles, une femme a été assassinée en pleine rue.  Des dizaines de coups de couteau. Le dos. La gorge.  On recherche un ancien compagnon ou mari, je ne sais plus.  Mais quelqu’un qui se croyait en droit de la maltraiter, de lui ôter la vie.  Des femmes battues, maltraitées, assassinées par celui avec qui elles vivent, ont vécu, il y en a des dizaines par jour, des centaines par mois, des milliers par an… Trop, trop, trop…

 Eléonore Mercier est écoutante dans une organisation qui se préoccupe des violences conjugales.  Le livre qui a paru – « Je suis complètement battue » - reprend 1653 premières phrases de qui a décidé d’appeler à l’aide, de dire assez, pour soi, pour une voisine, pour une collègue de travail, pour une amie, pour une sœur ou une mère. Et Eléonore Mercier a noté, noté, noté…

Je souffre depuis des années

Je vous appelle parce que mon concubin m’a tapée plus que d’habitude

C’est pour ma sœur qui travaille dans la société de son mari et n’a pas le droit de téléphoner

C’est pour une amie qui reçoit des coups gratuits

J’ai un mari qui n’aime pas la société Je voudrais partir loin Je vis avec mon mari et sa mère, ils veulent tous les deux que je parte

Effrayantes.  Emouvantes. Horribles. Toutes ces phrases sont autant d’histoires immédiatement accessibles, et c’est ce qui rend ce livre d’une force incroyable.  Parfois drôles, parce que maladroites. Souvent insupportables. Banales, comme le mal peut l’être au quotidien, ces phrases glanées au fil des années d’écoute, deviennent un poème, un chant, une incantation, que sais-je… un cri qui nous met face à une violence qui est toute proche…

Ma fille me dit qu’elle tombe dans l’escalier

Je suis le frère de la femme dont le mari prépare l’enlèvement

Mon mari est parti avec une des filles pendant que j’étais chez le médecin

C’est pour une femme victime de violences dont le mari est parti et revient pour la frapper

J’ai entendu à la radio que j’étais dans le même cas

J’ai dit à mon mari que j’allais faire les courses pour pouvoir vous appeler

Une de mes amies est dans un sale pétrin





mardi 28 décembre 2010

Il n'y a rien à Lot Station




Ce qu’il y a de bien avec les vacances, c’est qu’on a pas envie qu’elles se terminent, on a envie de prolonger les journées, ne pas rentrer. Hier soir, on s’est mis à traîner un peu. En montant dans le bus 50, Ugo me dit « Qu’est-ce qu’y a à Lot Station » ? (terminus de la ligne). « Je ne sais pas. On va voir ? » Nous voilà partis vers Lot Station. Le bus, bien achalandé au départ de la Gare du Midi, a perdu, peu à peu, de ses voyageurs. Une vingtaine de minutes plus tard, nous voilà arrivés.

Il n’y a rien à Lot Station, sinon une sorte de gare bunker qui mériterait d’être tagguée davantage. « On aurait dû descendre à Ruisbroeck. Ca semblait joli à Ruisbroeck». L’herbe est souvent plus verte ailleurs comme on dit. Nous n’avons pas repris le bus tout de suite. Nous avons marché le long des lignes ferroviaires. Perdue parmi tous les entreprises, bureaux et autres hangars, il y avait cette vieille cheminée. Le contre-jour donnait l’illusion de nombreuses personnes occupées à escalader la cheminée. Arrivées au sommet, elles disparaissaient.

Au retour, nous ne nous sommes pas arrêtés à Ruisbroeck.


dimanche 26 décembre 2010

Fin de marché



Il est bientôt 14h30. La place du Jeu de Balle et son marché aux puces se vident. Bruits de verre. Bruits de camionnettes qui avancent, qui reculent. Bruits de portes qu'on ouvre, qu'on ferme. J'avance sur cette place assommée de bruits et de débris. Des bouts de vie traînent. Des pages dédicacées, des photos de communion, des dessins d'animaux précis et appliqués. Un homme balaie et pousse ce que d'autres ont décidé d'abandonner. Il sont plusieurs à le suivre. Dès son départ, ils plongent dans la masse de bouts de bouts de ce qui fut quelque chose. Cela me fait penser aux mouettes qui suivent les bateaux de pêche. Je m'approche. Chacun prend, regarde, rejette ou met dans son sac. Ce ne sont pas des mouettes. Ce sont des vautours, des charognards qui plongent leurs mains, leurs crocs dans des objets décharnés.


jeudi 23 décembre 2010

C'est dimanche



C'est dimanche. C'est jour de sortie. Les autres jours, elle mange chez elle. Avec elle. Et parfois avec son chat. Quand il veut bien. Mais c'est dimanche, alors, comme tous les dimanches, elle sort. Elle s'attarde devant les menus. Ce n'est pas pour choisir, cela ne l'intéresse pas. Non, si elle s'y attarde, c'est pour pouvoir regarder qui est à l'intérieur, c'est pour repérer un autre solitaire. Quand elle en voit un, elle s'installe à proximité, dans l'espoir qu'une conversation s'engage. Les bons jours, l'établissement choisi est plein et elle peut s'installer à la même table que l'autre. Il n'est alors même pas besoin de discuter; manger en compagnie lui suffit.

 

mardi 21 décembre 2010

Le bout du Monde


Place Saint-Job. C’est Constantin Nicolaou qui m’y a emmené la première fois. Nous avions brossé un après-midi de cours. Il m’avait dit « On va à la foire ? ». Et il m’avait parlé d’un coin dont je n'avais jamais entendu parler. Tant qu’à ne rien faire, autant le faire loin de chez nous. Nous avions pris le tram et roulé une éternité. Impression d’avoir quitté Bruxelles. Alors que… J’y suis retourné bien plus tard. Une église avec un air de jamais vu nulle part m’a ramené plus de 30 ans en arrière. Impression d’être loin, d’être au bout du monde. Alors que… J’y retourne de temps en temps pour voir Nadia. C’est ma coiffeuse. Elle me raconte ses vacances, la rentrée des enfants, le travail de son mari. Je lui raconte mes vacances, la rentrée de mes enfants. Je n’ai pas de mari. Pendant qu’on discute, elle coupe mes cheveux. Cela prend peu de temps. On s’embrasse, on se souhaite de beaux jours à venir, avec l’espoir qu’ils le seront. Je sors du salon. Je regarde l’église. Elle m’impressionne encore. C’est jour de marché. La foire, c’est pour bientôt. J'y emmènerai les enfants. Je leur dirai "Venez, on va au bout du monde..."


lundi 20 décembre 2010

Rien



Trois ans sans se voir. Facebook, c'est ça aussi, reprendre contact avec quelqu'un qui a fait un bout de chemin sans qu'on en sache rien ou presque. Ce fut un beau moment comme on dit, l'un de ceux qui resteront, dont on se souviendra.
Repas 'Au vieux Laeken'. Carbonnades frites, parce que chez moi personne n'aime les carbonnades. On parle, on se souvient, on projette, on se reverra.

'C'était bon?'
'Très, merci'
'Moi, je prendrai un café'
'Moi, rien, merci'
'Rien? Je vais voir si j'en ai...'
'En tout cas, si vous trouvez Rien, vous aurez résolu une des grandes énigmes philosophiques'
Il est parti le sourire aux lèvres et est revenu avec ceci.

Belle journée. J'aurai appris que Thierry chausse du 48 et que le Rien existe, il suffit de le demander.


samedi 18 décembre 2010

Les anges déchus


 Au détour d’un couloir, je les vois. Ils sont occupés à se dépouiller de leurs ailes. L’opération prend de longues minutes. Chacun ôtant les plumes à l’autre. Aucun mot n’est échangé. Seule une expression de tristesse prend, peu à peu, place sur leur visage. De leurs trois mètres, il ne leur reste bientôt que la taille d’un homme moyen. De leur superbe, il ne reste, après ces longues minutes, que quelques mouvements gauches et désolants. Ils vident chacun un sac et choisissent des vêtements. Ils n’ont plus aucun regard l’un pour l’autre. Ils s’habillent. Les plumes passent progressivement du blanc au gris, comme des dents mal soignées. Ils terminent. Ils regardent autour d’eux. Ils partent et vont se mêler à la foule.


jeudi 16 décembre 2010

Mais qu'est-ce que je fous là?



Il m'a fallu quelques minutes pour m'assurer que ce n'était pas moi sur la photo.  Mais avant, quelle angoisse! Même regard idiot, mêmes sourcils trop fournis, mêmes lèvres inexistantes, même nez trop long... J'étais devant moi et je me disais, mais bon sang comment ils ont ça? Et puis, je me suis dit que non...  même si prises séparément - yeux/nez/bouche - les parties du visage sont exactement les mêmes que les miennes, mises ensemble, c'est pas tout à fait ça... enfin, j'espère... 


Envie de vérifier?  http://www.facebook.com/#!/photo.php?fbid=1514099374465&set=a.1593672003731.89054.1293868527


mercredi 15 décembre 2010

Mon bébé est nul




Dans les journaux, on reparle du redoublement… the ultimate weapon des enseignants qui n’ont rien de mieux à proposer.  On ne me fera jamais croire qui si un élève est obligé de redoubler, ce n’est pas d’abord un échec de l’enseignant.  Enseignant qui, par ailleurs, est juge et partie… peu importe ce qui se passe, ce sera l’enfant qui sera sanctionné.  J’ai été élève, je sais ce que c’est. Et si je n'ai pas redoublé; mais on redoublait moins à cette époque et croyez-moi je ne suis pas plus malin que mes enfants; c'est que j'ai eu de la chance ou que j'ai su répondre aux attentes des enseignants. Rien d'autre. Soit.  Admettons qu’en redoublant tout s’arrange… Mais c’est tout le contraire ! Les chiffres indiquent que 1 enfant sur 20 redouble en primaire, 1 sur 7 pour les trois premières années de secondaire, 1 sur 2 pour les trois dernières années… On ne trouverait pas plus à redire si l’évolution était inverse, mais là… Si cela sert à quelque chose, j’aimerais savoir à quoi.  Les pays qui pratiquent le redoublement intensif sont aussi ceux qui traînent en fin de liste aux tests PISA (qui mesure à l'échelle mondiale le niveau de l'enseignement), les premières places étant occupées par les pays qui ne le pratiquent pas.  Si ce n’est pas bêtise, maltraitance sur mineurs et corporatisme !

Mais asseyez-vous… (il paraît même que la ministre s’en alarme…) 5% des enfants redoublent en 3e maternelle !!! Redoubler en maternelle !!! Si ça c’est pas une entrée en grandes pompes dans la vie, je n’y connais rien.  Redoubler en maternelle ??? Ils ont raté quoi les gamin(e)s, la farandole ? le piquetage ?  il partage pas assez ses affaires ? Ooooh, les acquis nécessaires à son passage en primaire ne sont pas là… les O ne sont pas assez ronds sans doute… Outre que l’enseignement maternel n’est pas obligatoire, et ne devrait pas porter à quelque conséquence que ce soit ; et donc chers jeunes ou futurs parents, ne mettez pas vos enfants en maternelle, on ne sait jamais que les jambages de ses m ne soient pas suffisamment esthétiques ou qu’il oublie les paroles de la poule sur le mur qui picore du pain dur ; quel pedigree on lui prépare…

Vous savez quoi, je parie que dans quelques années, des bébés rateront à la crèche.  Ils ne mangeront pas assez vite.  Ou ils ne dormiront pas assez.  Ou ils chieront trop souvent… allez savoir… En tout cas, je ne ferai plus de bébé, trop peur qu’il soit nul.


mardi 14 décembre 2010

Début et fin de l'histoire



L’un découvre, l’autre contemple. L’un espère, l’autre attend. L'un ne s'étonne pas, l'autre ne s'étonne plus. L'un croit et l'autre sait que tout est possible. L’insouciance leur est commune. L’arbre et le banc les unis. Je me vois ayant été. Je me vois en devenir. Les interrogations demeurent-elles les mêmes ?

dimanche 12 décembre 2010

J'étais à ses pieds


Narbonne, été 2008. Nous nous sommes arrêtés. Fatigués, mais satisfaits de la route. « Bonsoir, nous avons réservé ». « Voici votre clé, bon séjour ». Nous entrons, nous nous embrassons. Elle va se doucher. Je m’étends sur le lit et je ferme les yeux. Je me sens bien. Elle revient. Belle. Désirée. Je la regarde. Puis, je baisse les yeux. Je suis à ses pieds. Je ne lui dis pas. Peu de jours séparent ce moment de la séparation. Je ne le sais pas encore. Le sait-elle déjà? J’étais à ses pieds. Et je ne lui ai pas dit.


mercredi 8 décembre 2010

La peur (2)



Un rare instant de calme. Je ne sais pas ce qu'il a vu, mais il arrête de gesticuler. Pourtant, on continue à l'éviter. J'en profite. Clic. Je profite de lui. Clac. Il n'en sait rien. Il regarde dans son panier. S'y trouve-t-il quelque chose? Depuis que je l'observe, je n'ai encore vu personne s'en approcher. Une enfant vient vers lui. Une femme crie. Trop tard, elle est devant lui. Il la regarde. Il sort une petite fleur de son panier et il lui donne. Elle sourit et repart en sautillant.


lundi 6 décembre 2010

La peur



Il m'arrive de les croiser. L'ours s'accroche toujours à lui. Peur de la ville. Peur des hommes. Parfois, il déambule à vélo, l'ours s'accroche encore plus fort. Peur des voitures. Peur de la rue. Alors, parfois, il se cache. L'ours n'a plus peur, il semble, enfin, plus serein. Cependant, il se met à l'écart. Il se coince à l'abri des regards. Il recherche un endroit où étendre leurs carcasses fatiguées. Il veille à ce que l'ours ne le lâche pas. Qui sait, il aurait peur et par maladresse effraierait les bonnes gens qui exigeraient qu'on s'en débarrasse. Alors, ils se cachent. Alors, ils évitent les regards.


samedi 4 décembre 2010

Le soir tombe



Le soir tombe. La nuit suivra. Le gardien a fermé les grilles. Les enfants, qui quelques minutes plus tôt tapaient dans un ballon, malgré le froid, malgré les glissades, sont partis, qui pour rentrer chez lui, qui pour jouer ailleurs. Un chien est resté de l'autre côté. Il m'a regardé quelques secondes, mais a vite compris que je ne pouvais rien pour lui. Je l'ai regardé s'en aller. Courtes pattes s'agitant et truffe fumante.


vendredi 3 décembre 2010

Someday I'm gonna smack your face


C'était il y a quoi... 30 ans, sûrement un peu plus... Ancienne Belgique, les Stranglers allument la salle comme peu l'ont fait.  Autre époque, autre public, ça saute, ça se pousse, ça se bouscule, ça se balance des coups et des claques... ça fait partie du spectacle.  JJ Burnel balance l'un ou l'autre coup de savate à qui veut vérifier qu'il est vraiment teigneux.  Tout s'enchaine.  Deux heures de dinguerie.
30 ans plus tard ou un peu plus... Botanique... Hugh Cornwell, chanteur et guitariste des Stranglers, débarque avec son matériel.  Ca traîne un peu, mais on est patient.  On est une centaine, 50 ans au compteur. C'est parti.  C'est parfois approximatif, mais on s'en fiche.  Ca commence à sauter, ça commence à se pousser, ça commence à se bousculer, ça commence à se balancer... des coups et des claques partent en douceur... c'est vite fini... On s'amuse comme on veut.  Ca dure deux petites heures.  Et puis ça se termine, et puis il s'assied et propose son dernier disque à la vente avec sa signature pour qui veut. Grandeur et décadence ou choix de carrière... who knows... n'empêche, voir ce gars, figure mythique pour ceux qui, comme moi, squattaient les salles de concert fin des années 1970, négocier ces chansons, ça éclaircit les idées.